Les principes de construction de ce curriculum
Son élaboration s’inspire des référentiels de formation de l’enseignement technique agricole français basés sur une approche par compétences et se réfère plus particulièrement au cadre d’analyse de la Didactique Professionnelle (Pastré, Mayen, Vergnaud, 2006). En cohérence avec ce cadre d’analyse, il a été construit en considérant que l’on ne peut apprendre que dans et par l’action. Il repose ainsi sur des apprentissages par le faire, les apprenants étant mis dans des situations de réalisations concrètes de tâches intégrant la mobilisation de savoirs paysans (pragmatisation de savoir).
Ces apprentissages par le faire sont suivis d’une phase d’explicitation qui stimule la compréhension de la tâche accomplie et la transposition du savoir appris à d’autres situations parentes. L’apprentissage par le faire ne signifie pas pour autant que les apports théoriques n’aient pas leur place. Simplement, ceux-ci ne sont plus considérés comme premiers dans l’acte d’apprentissage. Ils sont mis avant tout au service de l’activité pratique à réaliser. Le schéma ci-dessous résume les deux processus de conceptualisation (pragmatisation/ explicitation) à l’œuvre dans une situation d’apprentissage par le faire.
Ces deux processus de pragmatisation et d’explicitation procèdent de trois moments qui scandent le déroulé de la formation :
- Les apprenants sont d’abord placés dans une posture observante : un professionnel développe in situ un savoir-faire paysan.
- Les apprenants mettent ensuite en œuvre en petits groupes le même savoir-faire sous l’observation du professionnel et du formateur.
- Enfin, un temps d’explicitation (décontextualisation) est organisé en vue d’une recontextualisation.
La figure qui suit illustre ces trois moments.
C’est sur la base des principes précédemment précisés que la formation a été conçue autour de trois modules intimement interconnectés et sans ordre préétabli entre eux (ce sont les activités pratiques conduites au cours des apprentissages qui déterminent les moments propices des apports prévus au sein de chacun des trois modules) :
- Un module Général (MG) centré sur des apports génériques
- Un Module Professionnel (MP) axé sur l’apprentissage des gestes professionnels
- Un Module d’Andragogie (MA) destiné à développer les capacités réflexives des apprenants en vue de favoriser la réplicabilité des acquis de la formation et d’en assurer une diffusion élargie à l’échelle d’autres territoires et d’autres communautés d’apprenants.
Présentation du module général : MG1 : Agroécologie et Savoirs Endogènes
Quelles capacités visées ?
Comprendre les défis principaux de l’agriculture contemporaine dans un contexte de changements climatiques.
Comprendre en quoi la mobilisation de savoirs endogènes/paysans peut doter les agriculteurs de nouvelles capacités d’action en contexte mouvant.
Comprendre l’intérêt du recours à un raisonnement systémique en agriculture.
Quels objectifs ?
- Expliquer les limites du modèle agricole intensif et ses impasses économiques, sociales et écologiques
- Mettre en évidence les nouveaux pouvoirs d’action dont disposent les agriculteurs en réactivant l’usage des savoirs endogènes dans leurs pratiques.
- Montrer que la mise en œuvre de pratiques alternatives de nature agroécologiques appelle la mobilisation d’un raisonnement systémique pour gérer les interactions dynamiques entre agriculture et ressources naturelles (eau, sol, biodiversité).
Le module professionnel MP1 : Démarche didactique pour l’apprentissage de pratiques agroécologiques
Quelles capacités visées ?
- Choisir un cas emblématique d’une situation agroécologique reposant sur un savoir endogène/paysans comme support des apprentissages.
- Mettre les apprenants en situation de pratique observante puis de faire (contextualisation).
- Placer les apprenants en posture de réflexivité (décontextualisation).
- Transposer les méthodes d’apprentissage à l’examen d’autres cas concrets en agroécologie (recontextualisation).
Quels objectifs ?
Faire acquérir aux apprenants, futurs formateurs de formateurs ou paysans relais, une méthode pour choisir un problème adéquat servant de support aux apprentissages en agroécologie.
- Organiser avec un professionnel l’activité d’apprenants sur un terrain d’expérimentation et la contrôler.
- Organiser un débriefing de l’activité réalisée par les apprenants, sous la supervision du / des professionnel(s) détenteur du savoir paysan et du formateur pédagogique.
- Évaluer et faciliter la transposition de ces méthodes d’apprentissage à d’autres contextes et /ou problèmes et/ou ressources et/ou savoirs, etc.
Le module de base d’andragogie
Quelles capacités visées ?
- Être capable d’identifier les organisateurs invariants sur lesquels reposent la réussite d’une formation en agroécologie. Mettre les apprenants en posture de réflexivité vis-à-vis de la formation vécue : quels grands enseignements en tirent-ils pour organiser une formation en agroécologie ? Intérêt de placer les apprenants en situation de faire, de travailler en binôme avec un ou plusieurs professionnels, de privilégier une démarche inductive et pluridisciplinaire, de mettre en œuvre un processus d’apprentissage en trois temps : contextualisation-décontextualisation recontextualisation…
- Construire la cohérence de l’enseignement à dispenser : clés/outils méthodologiques pour élaborer une progression pédagogique, construire des séances d’enseignement, évaluer les acquis des apprenants. Sur la base des organisateurs invariants préalablement identifiés, demander aux apprenants de construire un dispositif de formation simplifié en petits groupes de 3 à 4 participants. Attendus possibles : élaborer un chronogramme, proposer une planification des enseignements, définir des contenus d’enseignement, proposer des modalités d’évaluation des apprentissages…
- Choisir les outils d’animation appropriés à sa pratique, au contexte d’enseignement et au public cible. Instaurer un climat propice aux apprentissages, maîtriser la pratique de la remédiation, adapter son enseignement au public cible (étudiants, professionnels, public hétérogène du point de vue du parcours, du niveau d’étude, etc.
Quels objectifs ?
- Réaliser un débriefing de la formation vécue pour en faire émerger les principaux organisateurs invariants de réussite d’une formation en agroécologie
- À partir des enseignements tirés de ce débriefing, mettre les apprenants en situation de faire pour concevoir une formation adaptée à leur territoire, leur futur public, les moyens disponibles.
- S’appuyer sur les deux objectifs précédents pour identifier avec les apprenants des techniques d’animation de groupes adaptées à leur territoire, leur futur public, les moyens disponibles…
L’emploi du temps de la formation et le référentiel complet
Comme il a été précisé ci-dessus, les trois modules ont été pensés pour fonctionner en interaction étroite sur une durée de 4 jours comme présenté dans le tableau ci-dessous :
En savoir plus : le référentiel de formation
Les conditions préalables à la formation
Au préalable, avant de mettre en place la formation, les étapes de constructions de la formation dans chaque pays sont les suivantes :
- Recenser les savoirs endogènes
- Choix des savoirs endogène adaptés à la localité, au calendrier et au format de la formation
- Choix et visite du lieu de formation
- Choix du professionnel et du formateur
- Choix des participants en veillant à la parité
- Réunion et accord de la municipalité
- Préparation des Termes De Référence (TDR), de la durée (1 ou 2 jours) et du calendrier de la formation en tenant compte des contraintes locales.
- Définir les moyens nécessaires
- Convocation des participants et partage des TDR à l’écrit ou à l’oral
- Définition des méthodes d’animation et répartition de l’animation
- Achat ou prêt, livraison, vérification et montage du matériel nécessaire
- Réunions de préparation
- Prévoir collation pour les participants